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Jeune Ambassadeur du Savoir - Montérégie

Trouver sa route

Tout débuta dans un petit village à proximité de St-Hyacinthe. Né en 1979, les médecins ont vite constaté que j’avais un problème au niveau cardiaque, le diagnostic a été une sténose à orthique. Les années passèrent et le début d’un long calvaire commença. Dès mon jeune âge, je me sentais exclu des autres car j’étais différent et dans ma tête, j’étais sûr de mourir jeune, alors la vie pour moi était assez difficile.

Le début du rejet

J’étais jeune et comme tous les jeunes, j’espérais avoir l’attention et aussi la complicité apportée à un enfant en bas âge. Ne manquant de rien au niveau de l’alimentation, je n’étais quand même pas à plaindre, mais de plus en plus, j’enviais les autres enfants, genre mes amis ou même mes voisins qui, eux, avaient un père présent, la personne de référence d’un enfant, celui qui doit penser qu’une vie en dépend. Souvent j’espérais qu’il change et devienne plus présent dans ma vie, mais le temps continua de tourner et de plus en plus j’accumulais les déceptions et plus le temps passait, plus la jalousie s’incrustait en moi à force de toujours voir les autres profiter du savoir et des connaissances de leur paternel. Moi, quand j’avais la chance de le voir, ce qui était assez rare, il n’avait pas toujours le temps de s’occuper de moi. Dans mon coeur d’enfant, je commençais à penser que j’étais de trop dans sa vie et qu’il ne voulait rien savoir de moi. Quand il travaillait le bois, je le regardais, espérant le voir m’apprendre des choses nouvelles mais ce n’était pas du tout ce qui se passait, c’était plus du genre « touche pas à ça » ou « c’est pas des jouets ». Moi, je me sentais comme un pauvre innocent et c’est avec cette façon de penser que j’ai grandi.

La période rebelle

Quelques années plus tard, il y a eu le divorce de mes parents. À ce moment, dans ma tête, tout est devenu confus, il n’y avait plus personne qui pouvait avoir le contrôle sur moi, j’étais rendu rebelle et ma façon d’attirer l’attention était de faire des mauvais coups. À l’école, je n’avais aucune motivation, peu d’amis et jamais je ne me sentais à ma place. Très jeune, je commençais à penser au suicide pour ne plus vivre ça. J’avais beaucoup de difficulté à dire mes sentiments et souvent je pleurais en espérant ainsi mourir. À l’école, j’étais le mouton noir, celui qui est toujours à part des autres. Je haïssais l’école et les professeurs, tout ça causé par de mauvaises expériences avec mes professeurs de première année au primaire. Je me suis fait serrer les bras et je me suis fait dire que j’étais une pâte molle et que je n’étais pas bon et tout ça, car j’avais de la difficulté à comprendre. Par la suite, j’ai aimé seulement deux années scolaires. Ces deux années-là, j’avais des professeurs attentifs et sans préjugé. Dans ces deux années-là, mes résultats se sont de beaucoup améliorés; je reprenais tranquillement le goût à l’école, mais toujours l’année suivante, pour me faire haïr l’école.

Chum et drogue

Puis est venu le secondaire, enfin sorti de l’enfer des préférences de petit village, j’arrivais maintenant dans une grande école où tout devenait possible. Dès mon arrivée, les amis et les connaissances n’arrêtaient plus de grandir et là je commençai aussitôt à vouloir prendre ma place. À cette époque, je ne croyais pas que ma vie dépendrait en partie de ce moment. De jour en jour, j’accumulais les retenues, les suspensions et toutes les mesures disciplinaires possibles et imaginables. Un jour, accompagné d’un ami, je fumai mon premier joint en espérant trouver une porte de sortie à tout ce que je vivais et que je voulais oublier. Ce moment fut le début d’un long et même très long voyage vers l’enfer. J’avais 14 ans.

Période sombre

L’année qui a suivi est celle que je regrette le plus maintenant, celle où je n’étais plus moi et où je croyais que je pourrais me départir de mes souffrances en faisant « suer » tous les gens autour de moi et même ceux qui m’étaient les plus chers. La drogue dominait ma vie, j’ai perdu de belles années à descendre dans l’enfer de la drogue, perdre le fil du temps, oublier mes valeurs et, par la même occasion, j’ai dû abandonner l’école. Durant cette année et quelques-unes qui ont suivi, je croyais avoir beaucoup d’amis mais avec le temps, je me suis aperçu qu’ils n’en étaient pas. Encore là, je me suis senti abandonné. La vie pour moi était devenue un enfer et la seule solution que j’envisageais, c’était de mettre fin à mes jours. J’avais toujours dans mon auto mon tuyau de balayeuse et ma roulette de « tape » et j’étais prêt à passer à l’action. La seule chose qui me retenait, c’était les gens que j’aimais et aussi l’espoir de pouvoir enfin un jour être bien mais, à ce moment, le mal était si fort que j’ai vraiment cru y passer.

L’amour apporte le changement

J’avais une copine à qui je tenais vraiment et c’est pour cette raison que j’ai pris la décision d’arrêter la drogue et, par la même occasion, faire le ménage de ma vie. J’ai tassé de ma vie les personnes qui avaient une mauvaise influence sur moi, je me suis trouvé un emploi et me voilà reparti pour une nouvelle aventure.

Le travail en usine

Par la suite, j’ai travaillé dans quelques usines à des salaires peu intéressants, mais durant un bon bout, je croyais que c’était ce que je méritais et que je ne pouvais accomplir autre chose que ça. De jour en jour, je me sentais comme un moins que rien et de plus en plus je m’enfonçais dans le noir et devenais encore plus convaincu que j’étais un pourri. Le tout a été couronné par plusieurs déceptions amoureuses, j’étais vraiment désemparé et je ne voyais aucune porte de sortie. C’était l’enfer, ma mère et mes soeurs me voyaient m’enfoncer et ne réussissaient pas à me convaincre de consulter quelqu’un de qualifié pour ce genre de problème car, selon moi, je n’avais pas de problème.

Horaire très chargé

La vie étant ce qu’elle est, quelque temps après, je rencontrais une femme très bien et que j’ai aimé beaucoup. Avec elle, j’ai appris beaucoup sur la vie et j’ai décidé de reprendre ma vie en main. C’était le début du retour sur les bancs d’école mais seulement à temps partiel les soirs après le travail. Durant plus d’un an, j’ai fréquenté l’école par les soirs, c’était très difficile ! J’ai été reclassé en alphabétisation et je voyais ce défi comme quelque chose d’inaccessible, mais je tenais à continuer car petit à petit je commençais à savoir que je méritais mieux que ce dont je m’étais toujours contenté. Le travail, l’école et l’amour, c’était un peu trop !

Retour à zéro

Pour commencer, je me suis à nouveau retrouvé seul, je ne voyais aucun avenir dans mon travail et mes qualités n’étaient pas reconnues, alors j’en suis venu à détester mon travail et à trouver la vie de plus en plus longue jusqu’au jour où mon employeur me congédia suite à une différence d’opinion face à mon travail et aux conditions auxquelles j’étais confronté. À ce moment précis, j’étais complètement anéanti et mon sentiment de rejet était à son plus fort. Encore une fois, je me suis senti innocent, sans aucune importance, sans talent, bon à rien, je voulais mourir et j’y étais prêt. J’ai pris mon « char » et suis retourné chez moi, je pleurais comme un enfant enragé, les veines me sortaient partout dans la face, j’étais rouge comme une tomate et les yeux rouges, tellement rouges que c’en était apeurant. Quand ma mère m’a aperçu dans cet état, elle a paniqué et elle m’a immédiatement ordonné d’aller voir le médecin, j’ai finalement, en dernier recours, décidé d’aller le rencontrer.

Enfin de la lumière

À mon arrivée, le docteur a vite constaté que je souffrais de dépression depuis déjà très longtemps. Il m’a parlé et m’a immédiatement conseillé de rencontrer du personnel formé pour ce genre de trouble. Suite à cette rencontre, je me suis présenté au CLSC avec en main la référence du médecin et ils m’ont immédiatement rencontré. Par la suite, j’ai rencontré un travailleur social durant plus d’un an et j’ai assisté à plusieurs conférences sur l’estime de soi. Durant cette période, j’ai appris beaucoup sur moi et sur mes capacités. La force que j’ai trouvée durant ce temps a été pour moi la découverte de la vie et j’ai enfin pu voir autre chose que la mort pour me sortir de cette impasse.

La passion = raison de vivre

Durant ce moment, j’ai découvert une passion, un moyen de faire le vide. C’est chanter ! Chanter pour sortir le méchant et me libérer du méchant qui essaie de me faire rechuter mais sans succès. La force que je prends dans la chanson m’apporte un énorme sentiment de bien-être inégalé et la force de me battre contre les divers obstacles sur mon chemin.

En route vers l’avenir

Avec les nouvelles ressources que je possédais, je décidai ensuite de réorienter ma vie et de suivre un cours donné au Carrefour jeunesse emploi de St-Hyacinthe sur l’orientation et, avec celui-ci, j’ai approfondi ma connaissance de moi et j’ai enfin découvert en quoi j’aimerais travailler et de quelle façon je voulais vivre ma vie.

L’école pour réussir

J’étais enfin décidé de retourner à l’école à temps plein et ainsi obtenir des résultats me prouvant que seulement moi pouvais décider où allait ma vie et ce que je suis vraiment. Maintenant, j’aime l’école et mon désir de mourir s’est transformé en besoin d’apprendre et de comprendre la vie et d’en obtenir les plus beaux moments. Aujourd’hui, je dois la vie à mon médecin et aussi à ma mère qui m’a poussé à agir. Sur ce, je souhaite vraiment que ceux qui vivent cette situation trouvent leur voie et cessent de vivre cet enfer !!!

Frédéric Fortin, Centre de formation des Maskoutains, St-Hyacinthe

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