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Jeune Ambassadeur du Savoir - Montérégie

De décrocheur à entrepreneur

Dans la petite entrée de la bouquinerie du boulevard Cartier à Belœil, ce sont les livres qui nous accueillent. Des bouquins, il y a en partout. Dans des boîtes, sur des étagères, dans l’arrière-boutique; il y en a environ 40 000 au total, une vraie mine d’or pour les chasseurs de trésors. Toutefois, c’est son propriétaire, Frédéric Fortin, qui cache la plus belle histoire.

«J’ai décroché de l’école à l’âge de 14 ans alors que j’étais en 2e secondaire. C’était une période de ma vie très sombre et je ne voulais plus rien savoir de l’école», explique Frédéric Fortin. La motivation n’y était pas et les mauvaises influences s’accumulaient. Il a donc décidé d’aller travailler en usine. «C’était rendu que je sentais les professeurs me pousser dans le dos pour ne plus me voir. J’étais extrêmement rebelle, confie M. Fortin. Après avoir décroché, j’ai travaillé pendant sept ans dans des shops. Les salaires étaient bas et c’était déprimant, car ce n’était pas ce que je voulais faire dans la vie. Mais je croyais que c’était ce que je méritais».

Remise en question

Déprimé de la direction que prenait sa vie, Frédéric Fortin a décidé de retourner sur les bancs d’école. Il s’est inscrit aux cours du soir à l’éducation aux adultes pendant plus d’un an au Centre régional intégré de formation de Granby tout en continuant de travailler. «Lors de ces cours, j’ai été reclassé en alphabétisation. Ça a été très difficile et je voyais ça comme une montagne. Cependant, je tenais à continuer, car je commençais à entrevoir que je méritais mieux», explique-t-il.

Par la suite, tout s’est mis à débouler lorsqu’il a perdu son emploi en usine. Tout d’abord, des cours d’orientation au Carrefour jeunesse emploi à Saint-Hyacinthe, qui lui ont permis de travailler sur lui et de trouver le domaine qui l’intéressait. Son champ d’activité: la gestion de commerce. «Ça allumait des étincelles dans mes yeux», confie-t-il.
Se fixer un objectif a d’ailleurs été la clé de la réussite selon lui. Il a mis quatre années à compléter son secondaire au Centre de formation des Maskoutains et son cégep, à Saint-Hyacinthe. «J’ai trouvé divers moyens pour m’accrocher à mon rêve. Je me suis impliqué énormément dans la vie étudiante et j’ai travaillé à la cantine étudiante pour être plus près des gens», explique-t-il.

L’homme maintenant âgé de 30 ans a complété ses études collégiales avec une moyenne de 93 %. Il a d’ailleurs remporté au passage un Laurier d’argent, récompensant le deuxième meilleur élève de sa cohorte. Revigoré, il a tenté sa chance sur le marché de l’emploi, mais s’est constamment buté à des portes closes en raison de son unilinguisme. «Je me suis exilé à Calgary pendant un an et demi. Le jour, je travaillais dans un dépanneur et le soir, je prenais des cours d’anglais», explique Frédéric Fortin. Pas mal pour quelqu’un que l’on décrivait comme analphabète quelques années auparavant.

L’esprit d’entrepreneur

Longtemps éteint sous des tonnes de soucis, l’esprit entrepreneurial de Frédéric Fortin commençait à refaire surface. Vendeur de roches à trois ans, de gommes au primaire et instigateur d’un dépanneur mobile lorsqu’il travaillait en usine, il a repris les rênes de la bouquinerie que tenait son père jusqu’à tout récemment. «C’est en lisant le livre de Russel H. Conwell, Des hectares de diamants, que mes yeux se sont ouverts. La morale du livre dit qu’il est important d’apercevoir toute la richesse qu’il y a autour de nous. Mon père n’avait plus la motivation pour continuer, alors que moi, je me sentais prêt à accomplir mon rêve d’avoir mon entreprise. J’ai fait les démarches nécessaires», explique M. Fortin.
«J’ai des projets plein la tête. Je compte rénover la boutique pour qu’elle soit plus accueillante et qu’il soit plus facile d’y retrouver les livres. Je tiens notamment à accorder beaucoup d’importance à la section pour enfants», souligne l’entrepreneur.

En plus d’être maintenant propriétaire de sa bouquinerie, Frédéric Fortin réserve de son temps pour donner des conférences dans les écoles. Le but: sensibiliser les gens au fait que revenir aux études, c’est possible. «L’éducation, c’est primordial. Cependant, j’en profite également pour parler de l’importance de se connaître et d’avoir un objectif en étudiant», souligne-t-il.

La bouquinerie de M. Fortin est située au 221, boulevard Cartier, suite 100, à Belœil et est ouverte du lundi au samedi.

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